L'épopée cathare
1- Les origines du Catharisme.
Pour comprendre le catharisme, il faut plonger dans les racines lointaines, dans les croyances qui naissent sur les rives de l'Indus plusieurs siècles avant notre ère et instaurent des religions dites "dualistes".
C'est entre 660 et 583 avant J.C qu'aurait vécu en Iran, Zoroastre (plus connu sous le nom de Zarathoustra) dont le principal apport fut d'avoir mis en forme les diverses religions antiques qu'il transmit à travers le mazdéisme. Celui-ci enseigne l'existence de deux dieux, deux forces qui s'affrontent dans l'univers; le dieu du mal ou des ténèbres, Arhiman et le dieu du bien ou de la lumière, Ahura Mazda.
Le nom «cathares» (du grec, katharos, «pur») fut adopté par de nombreuses sectes chrétiennes du Moyen Âge. Les cathares se signalaient par leur ascétisme rigoureux et une théologie dualiste fondée sur le manichéisme : la croyance en l'affrontement du Bien et du Mal, reflet d'un univers composé d'un monde spirituel créé par Dieu opposé au monde matériel créé par Satan, dans lequel le Bien sort finalement vainqueur de son combat avec le Mal et les hommes, dans un jugement dernier, sont punis ou récompensés de leurs actes. Dès le IIIe siècle, l'hérésie chrétienne novatienne fut qualifiée de cathare parce qu'elle excommuniait tous les chrétiens apostats ou simplement fautifs, même repentis.
2 - Les Albigeois ou Cathares.
Les qualificatifs d'Albigeois (région d'Albi) ou cathares ne sont pas uitilisés à l'époque par les adeptes de cette religion. En fait, il n'existe pas, chez eux, de terme générique pour nommer leur doctrine. Ils se disent "chrétiens" et, pour désigner les prêtres de leur religion, les fidèles ou croyants emploient l'expression significative de "Bons Hommes". Par dérision, les catholiques les appelèrent "parfaits" puis le mot "Albigeois" est employé par leurs adversaires au XIIIème siècle et désignera les adeptes de cette religion néo-manichéenne du midi de la France.
3 - La religion Cathare.
Le Catharisme, affilié aus religions dualistes qui se sont développées depuis l'Antiquité, prône également l'existence des deux principes fondamentaux du Bien et du Mal.
La religion des Bons Hommes distingue l'esprit, oeuvre de Dieu et le corps ainsi que toute matière, oeuvre de Satan. Héritière des religions manochéennes et gnostiques qui se sont développées parallèlement au christianisme, la doctrine cathare ne rejette pas entièrement les dogmes chrétiens. Paradoxalement, les cathares se réclament du christianisme primitif mais rejettent l'Ancien Testament, les sacrements (même celui du mariage), et se réfèrent au Nouveau Testament, notamment à l'Evangile selon saint Luc. Prônant un détachement total de la vie matèrielle, émanation du Mal, les cathares sont amenés à suivre des principes stricts d'ascétisme. Ils croient à la réincarnation qui mène l'homme peu à peu à la perfection et à la vie éternelle. Ils sont végétariens, doivent s'abstenir des désirs charnels et sont totalement indifférents aux biens matériels. Il n'existe dans leur rituel qu'un seul sacrement : le consolamentum par lequel le croyant devient un "Bon Homme" (ou prêtre) et qui est accordé au malade à l'heure de sa mort.
Leur culte est d'une grande simplicité et leur unique prière est le Pater.
Tout au long du XIème siècle, l'hérésie cathare s'est enracinée dans les terres du midi languedocien. Elle compte des adeptes dans toutes les couches de la société : auusi bien chez les seigneurs que dans la bourgeoisie ou le milieu artisanal.
4 - La répression.
La croisade spirituelle.
Les tentatives d'évangélisation de Saint Bernard ou le concile de Lombers en 1165, près d'Albi, dernière tentative de rapprochement entre cathares et catholiques, s'avèrent être un échec total.
Avec l'élection du pape Innocent III en 1198, la lutte contre l'hérésie cathare prend une nouvelle dimension. Celui-ci va mettre tout en oeuvre pour extirper du Languedoc la religion hérétique qui représente une trop grave menace pour l'unité de l'église catholique.
La croisade armée.
Le 14 janvier 1208, le légat du pape Pierre de Castelnau est assassiné, près de Saint Gilles du Gard, sur les terres du conte Raymand VI de Toulouse. Les soupçons se portent immédiatement sur ce dernier, convaincu depuis longtemps d'aider les hérétiques sur ses domaines et par ailleurs ayant entretenu des relations tumultueuses avec le légat assassiné. Innocent III ne pouvait trouver de meilleur prétexte pour déclencher une croisade armée contre les Albigeois.
Il fait appel au roi de France, Philippe-Auguste qui, préoccupé par ses rivalités avec l'Angleterre et peu désireux de guerroyer contre son cousin du Languedoc, refuse de s'engager dans la croisade. Il accepte toutefois que ses fidèles vassaux, tels le duc de Bourgogne, le conte de Nevers ou le conte de Saint Pol, prennent les armes.
Une armée considérée comme la plus importante levée en Europe à cette époque est constituée, rassemblant toute la chevalerie des pays du Nord. Placée sous la bannière de l'Eglise, leur chef n'est autre que le légat du pape Arnaud Amaury, abbé de Citeaux.
L'inquisition.
A la suite du traité de Meaux qui prévoyait l'éradication complète de l'hérésie cathare, le concile de Toulouse, présidé par le légat Romain de Saint Ange, met en place les procédures de l'Inquisition, institution qui allait sévir pendant des siècles dans toute la Chrétienté.
Les tribunaux de l'Inquisition sont composés de frères Dominicains, ordre créé par Saint Dominique, qui ne sont responsables, dans leurs agissements, que devant le pape. C'est dire que, fort de ce pouvoir absolu, la répression est terrible et impitoyable dans le midi
Languedocien et les prisons inquisitoriales sont bientôt pleines.
LA PREMIERE CROISADE CONTRE LES CATHARES (1209-1213)
- 22 juillet 1209 : prise de Béziers et massacre de ses habitants
- 1er août 1209 : chute de la Cité de Carcassonne
- 10 novembre 1209 : mort de Raymand-Roger Trencavel, vicomte de Carcassonne, Béziers et Albi.
- Mars 1210 : Montlaur (N-E), habitants pendus .Bram (Ouest de Carcassonne), supplice : on creva les yeux à une centaine de cathares
- Avril 1210 : Cabaret (Nord de Carcassonne) attaque Alaric (S-E de Carcassonne) siège et prise du château
- Mai 1210 : échec de l'alliance Pierre II d'Aragon et les barons du comté de Carcassonne à Montréal.
- Juillet 1210 : chute de Minerve (N-E de Carcassonne 1er bûcher : 140 cathares brûlés).
- Août-Nov. 1210 : Puivert (S-O), Termes (S-E) siège et prise.
- Mai 1211 : siège de Lavaur (entre Albi et Toulouse) 300 à 400 cathares brûlés
- Mai 1211 : Les Cassès (S-O de Castelnaudary) 60 cathares brûlés.
- Juin 1211 : échec du siège de Toulouse.
- Septembre 1211 : bataille de Castelnaudary.
- 1212 : conquête du Lauragais, du pays Albigeois, du Bas-Quercy et de l'Agenais.
- 1213 : bataille de Muret, mort du roi Pierre II d'Aragon et défaite écrasante des méridionnaux.
- 1215 : soumission de Toulouse, exil de Raymond VI et de son fils à la cour d'Angleterre.
- 1216 : mort du pape Innocent III, élection d'Honorius III.
- 1217 : Prise de Montgaillard et soumission de Peyrepertuse
Reconquête de Toulouse par Raymond VI.
- 1218 : mort de Simon de Monfort devant Toulouse qu'il assiégeait.
- 1222 : mort de Raymond VI de Toulouse, son fils Raymond VII lui succède.
Amaury de Monfort abandonne ses droits sur le Languedoc à la Couronne de France.
- 1223 : mort de Philippe Auguste et du comte Raymond Roger de Foix.
LA 2ème CROISADE : LA CHEVAUCHEE DE LOUIS VIII (1226-1229)
Pour intervenir et conduire une croisade, Louis VIII, fils de Philippe Auguste, pose dès 1224 ses conditions au pape et propose que les terres confisquées aux cathares lui reviennent. Devant le refus du pape, en janvier 1228, il fait adopter par le parlement le principe d'une 2ème croisade pour condamner Raymond VII et obtenir la cession de tous ses droits au royaume de France.
- 1226 : excommunication de Raymond VII et croisade royale de Louis VIII.
L'INQUISITION ET LA FIN DES CATHARES (1229-1321)
Le pape Grégoire IX qui a succédé à Innocent III a décidé de prendre les affaires en main sans avoir de comptes à rendre ni aux évêques ni au pouvoir civil. Il va s'appuyer sur les ordres religieux et en particulier sur les dominicains.
Le mot inquisition vient du latin "inquirere" qui veut dire s'enquérir. Le 4ème concile de Latran en avait fixé les règles, remise des hérétiques au pouvoir civil. La procédure est expéditive, le tribunal annonce son arrivée dans la ville. On agit sur dénonciation, un témoin a vu, l'accusé n'a pas d'avocat, le recours à la torture est possible, ingestion d'eau, pieds brûlés, torsion des membres. A la fin du procès, sentence et remise du condamné au pouvoir civil pour exécution de la sentence.
Le tribunal est composé d'un prêtre et de deux laïcs.
- 1229 : traité de Meaux ou de Paris qui entérine la soumission du comte de Toulouse
Concile de Toulouse qui prévoie la répression de l'hérésie cathare.
- 1233 : mise en place des tribunaux inquisitoriaux.
- 1240 : rébellion du vicomte Trencavel et chute du château de Peyrepertuse.
Jean de Beaumont va reprendre toutes les Corbières, la répression est féroce. Les chateaux qui résistent sont brûlés, ceux qui se rendent sont épargnés ou emprisonnés.
- 1242 : massacre d'Avignonet.
- 1244 : capitulation de Montségur, 200 hérétiques sont brûlés au camp des cramats.
- 1249 mort du comte Raymand VII de Toulouse.
- 1255 : chute de Quéribus.
- 1271 : mort d'Alphonse de Poitiers et de Jeanne de Toulouse, sans héritiers.
Le Languedoc est définitivement annexé au royaume de France.
Après leur soumission à Saint-Louis, beaucoup de seigneurs comme Olivier de Termes pour se racheter accompagneront Saint-Louis en Terre Sainte. Les derniers refuges cathares livrés, il faudra attendre encore 70 ans avant de voir périr sur un bûcher le dernier cathare.
(Extraits de "Le Pays Cathare - Le Catharisme" par Didier Poux).